Né à Paris en 1991 et de nationalité Française. Vit et travaille à Aubervilliers (Région parisienne).
Démarche artistique
Artiste peintre, Romain Zamet s'intéresse dans sa pratique à la notion d'entre-deux. Par la représentation de zones de passages et d'instants transitoires, l'artiste installe, dans une peinture à la facture réaliste, des formes, des objets ou des personnages semblant abandonnés au croisement de décors souvent fermés. À l'instar d'artistes comme Jonathan Wateridge, Victor Man ou Michael Borremans, ses compositions aux temporalités troublées, pleines de paradoxes, mêlent souvenirs et devoir de mémoire à des futurs aussi instables qu'incertains.
Son association de couleurs secondaires aux teintes incandescentes, appuyées par la représentation de lieux ou d’attitudes étranges, évoque une atmosphère ignée à la fois oppressante, mais aussi étonnamment chaleureuse, voire résiliente. De ses nuances calorifiques émerge un chimérique “infrarouge”. De ce rayonnement à la couleur rouge palpable mais éphémère résulte une narration multidirectionnelle aux caractères ambivalents : celle de la perte, de l’insaisissable, mais aussi celle d’un espoir dans la symbolique du mouvement figé ; le désir de fuite et la recherche d’une échappatoire.
En travaillant uniquement à partir d’archives photographiques personnelles lambdas qu’il recompose et reconstitue, Romain Zamet réintroduit dans ses œuvres sa part d’intime. D'une réalité vécue et tangible qu’il définit comme “chaude” à ses sources digitales qu’il considère “éteintes” se réinstalle par la peinture une couche d'authenticité à l’apparence limitée, à peine perceptible. Presque en sursis, cette dernière apparaît en permanence à la frontière entre disparition et résistance, en oscillation entre vérité et illusion. Face à la multiplication de visuels provenant des médias de masse et désormais de l'IA, l’artiste questionne par l'utilisation du médium pictural la permanence et la véracité de notre sensation à l’image.
Born in Paris in 1991, French. Lives and works in Aubervilliers (Paris region).
Artistic approach
As a painter, Romain Zamet is interested in the notion of the in-between. In his realistic paintings, he depicts areas of passage and transitory moments, with forms, objects and characters that seem to be abandoned at the crossroads of often closed settings. Like artists such as Jonathan Wateridge, Victor Man and Michael Borremans, his compositions are full of paradoxes, blending memories and the duty to remember with futures that are as unstable as they are uncertain.
His combination of secondary colours with incandescent hues, supported by the representation of strange places or attitudes, evokes an igneous atmosphere that is both oppressive and surprisingly warm, even resilient. A chimerical ‘infrared’ emerges from its heat-inducing nuances. From this palpable but ephemeral red radiation emerges a multidirectional narrative with ambivalent characters: that of loss, of the elusive, but also that of hope in the symbolism of frozen movement; the desire to escape and the search for a way out.
Romain Zamet reintroduces his intimate side into his work, working exclusively from personal photographic archives that he recomposes and reconstitutes. From a lived, tangible reality that he defines as ‘hot’ to his digital sources that he considers ‘extinguished’, he reinstates a layer of authenticity through painting that is limited in appearance and barely perceptible. Almost on borrowed time, this layer constantly appears on the borderline between disappearance and resistance, oscillating between truth and illusion. Faced with the proliferation of visuals from the mass media and now from AI, the artist uses the pictorial medium to question the permanence and veracity of our sensation of the image.
Textes critiques
Texte de Lorry Besana, Mars 2025 - Résidence de l'H du Siège, Valenciennes (59)
« Ce qu’il reste des braises »
La peinture de Romain Zamet se caractérise par une atmosphère d’errance. Les scènes représentées apparaissent comme des "nœuds" - des points de rencontre entre différentes réalités - qui ouvrent des espaces d’interprétation et de résilience.
Par une approche sensible, presque tactile, l’artiste construit des images insaisissables, prêtes à se dérober sous nos yeux. Privées de repères temporels, elles révèlent des paradoxes figés par une palette de couleurs saturée et expressive. Les tonalités de rouge nous retiennent et finissent par s’évanouir, révélant des touches de vermillon, d’orange et d’ocre qui guident la lecture par leurs contrastes dynamiques.
À mesure que les regardeur.se.s se rapprochent, la structure des paysages se dissipe. L’absence systématique des lignes d’horizon dévoile toute l’ambiguïté du geste pictural. De cette manière, l’artiste veille à maintenir une sensation d’entre-deux, dans laquelle différentes strates de perception se croisent entre l’action et la contemplation.
Ces scènes, situées à la lisière du réel, sont traitées comme des souvenirs altérés par le temps. Elles deviennent des champs de projection émotionnelle - où la passion exacerbée des peintres romantiques a pris racine. Certaines pièces, comme Homme noir debout ou encore Le fossoyeur, s’avèrent être de véritables archives vivantes. Elles sont habitées par des restes d’artefacts et quelques présences humaines, dont les corps se confondent avec les chemins qu’ils semblent emprunter.
Une interrogation, inspirée par la pensée de Paul Ricoeur, traverse le travail de l’artiste : De quoi - et pour qui - fait-on mémoire ? Refusant d’y apporter une réponse fixe, Romain Zamet explore les contradictions du souvenir pour inscrire son approche dans une tension non résolue.
Dans la série « (Faites) que les braises tiennent », la figure du terril devient un point d’ancrage pour interroger notre rapport à l’espace et au temps. Ces reliefs artificiels - amas de déchets minéraux, dont le coeur encore chaud accueille une végétation singulière - incarnent une mémoire ambivalente : ils rappellent les fractures socio-économiques, la souffrance des travailleurs et se positionnent comme des marqueurs identitaires du territoire.
Romain Zamet déploie des gestes amples, des mouvements larges pour mettre en exergue ces reliefs observés. Entre effacement et intensité, les ravines dialoguent avec des teintes violines, rougeoyantes de la végétation hivernale, mordues par la vivacité de quelques lignes bleutées. Sa touche, résolument rugueuse, laisse transparaître des lignes chaotiques ponctuées de crêtes et de creux. L’artiste y matérialise toute la charge ambiguë des terrils, à la fois objets d’exploitation et sujets de contemplation.
Par leur présence, ces crassiers deviennent alors des objets géopoétiques : des points de relecture du paysage, qui seraient en capacité de recréer de nouveaux récits. Ils matérialisent les tensions entre la mémoire et l’oubli, des vecteurs de résilience qui façonnent nos identités collectives.
Bien qu’elle demeure un obstacle à cette dynamique de résilience - à la fois sur les plans physique et symbolique - La figure du terril apparaît comme une cicatrice collective, un vestige que l’on tente de sublimer, de raconter. Ces paysages, dont l’équilibre repose sur une interaction constante entre l’humain et son territoire, mettent en lumière un lien évident entre nos modes de vie et l’environnement, à l’instar du travail photographique d’Ursula Schulz-Dornburg. L’intervention humaine se place comme une composante à part entière de ces écosystèmes, en perpétuelle évolution.
Par son approche, Romain Zamet cherche à se saisir de l’incertitude pour raconter les traces déposées dans le réel. Il nous invite, quelques instants, à déambuler sur des sentiers qui naissent d’interactions complexes et ouvre une réflexion sur la résilience sous toutes ses formes - qu’elle soit individuelle, collective ou naturelle.